Mémoire | Spectacle vivant

L'Espèce humaine , d'après Robert Antelme - Compagnie Théâtre vivant

L'Espèce humaine, le livre de Robert Antelme paru en 1947, est à la fois un témoignage personnel sur la déportation et une réflexion profonde sur la condition et le statut du déporté et son irréductible humanité. Ce texte, découvert à l’âge de 25 ans par l'actrice et metteuse en scène Anne Coutureau, l’a marquée au point que des années après, elle a éprouvé l’impérieux besoin de le faire connaître, notamment aux plus jeunes.

Représentations jusqu'au samedi 29 juillet 2023, Festival d'Avignon - Théâtre Les 3 Soleils, 17h35

Cette adaptation théâtrale pour une actrice est d’une grande ambition au regard de cette œuvre majeure dans la littérature concentrationnaire qu'est L'Espèce humaine. Le livre de Robert Antelme, paru en 1947, est à la fois un témoignage personnel sur la déportation (l’auteur fut arrêté par la Gestapo en juin 1944, emprisonné à Fresnes puis déporté à Buchenwald, versé dans le kommando de Gandersheim avant d’être transféré à Dachau) et une réflexion profonde sur la condition et le statut du déporté et sur son irréductible humanité. On n’a pas besoin de souligner ici la force d’un texte qui a été salué comme fondamental par de multiples témoins, écrivains et intellectuels à sa parution (et ultérieurement). Georges Perec a pu écrire qu’il s’agissait de " l’exemple le plus parfait, dans la production française contemporaine, de ce que peut la littérature", à savoir "la transformation d’une expérience en langage". 

L'adaptation d'Anne Coutureau, actrice et metteuse en scène, et cofondatrice de l'Atelier du théâtre vivant, résulte d'une expérience personnelle intense : ce texte, découvert à l’âge de 25 ans, l’a marquée pour ne plus jamais la quitter. 25 ans après, elle a éprouvé l’impérieux besoin de le faire connaître, notamment aux plus jeunes.

"Il a changé ma vie. Miracle de la littérature. Miracle de la conscience dans le temps.

J’avais vingt-cinq ans et ce livre ne m’a plus quittée ; au sens propre il n’a pas quitté ma table de nuit, et il n’a pas quitté mon âme. Il ne cesse de la travailler.

C’est une parole vivante, qui agit en moi, au point de nécessiter aujourd’hui le besoin impérieux de la partager."

L'approche sensible de l’actrice, accompagnée du metteur en scène Patrice Le Cadre, réfléchie dans sa manière d’adapter ce monument, en respectant la précision de l’écriture, des idées et la distance à l’émotion. Anne Coutureau décrit les questions qui se sont posées à elle, pour ne pas trahir l’œuvre, la détourner ou l’affadir. Il ne s’agit donc pas pour elle d’incarner Antelme mais de venir "visiter l’expérience, le passé d’un homme".

Il n’y a pas de réécriture du texte : l’actrice adopte une posture intermédiaire entre les mots d’Antelme et le public ; elle traduit, rapporte, restitue… sans prétendre incarner Antelme. Elle ne peut être un "personnage de théâtre" puisqu’il ne s’agit pas d’une fiction – mais le parti pris clairement affirmé est celui de la sobriété et du refus d’un trop-plein d’émotions.

Cette pièce constitue la première adaptation de l’œuvre d’Antelme, les ayants-droit de Robert Antelme ayant par exemple refusé que Mathieu Coblentz utilise l’œuvre dans un spectacle intitulé L’Espèce humaine ou l’Inimaginable, récemment donné.

Anne Coutureau a donc reçu cet accord pour son adaptation fidèle. Elle n’a en effet pas voulu toucher au texte original. L’adaptation a consisté à sélectionner des passages, structurés en trois parties d’inégale importance : la première – la plus importante –, intitulée "Gandersheim", décrit l’univers concentrationnaire dans ce kommando de Buchenwald ; la seconde, "la route", correspond à la marche de la mort, lors de l’évacuation du camp ; la troisième, très courte, s’intitule "la fin".

L’auteure souligne par ailleurs l’"actualité redoutable" d’un tel texte à notre époque : migrations internationales obligeant à faire des tris, confrontation aux nationalismes, hiérarchisation des hommes au regard des enjeux auxquels nous sommes confrontés.

Pour en savoir plus

 

 

 

Anne Coutureau à la Cartoucherie © Photo Marasco

Anne Coutureau à la Cartoucherie © Photo Marasco

La pièce, montée par la Compagnie Théâtre vivant, a été donnée à la Cartoucherie du 5 au 15 janvier 2023. 

Cette série de représentations au Festival d'Avignon a reçu le soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah.

 

Représentations du vendredi 7 au samedi 29 juillet 2023, 17h35

Relâche les 3 mardis du mois

Théâtre Les 3 Soleils
4 rue Buffon
Avignon

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